Quelles conséquences financières du concubinage lors d'un décès ?

Chronique d’Albert Gallegos - parue dans Bilan - juillet 2023

Entre le statut de marié et celui de concubin, les différences de traitement peuvent être importantes lorsqu’un décès survient. Si certains cantons ont pris des mesures pour « égaliser » la fiscalité entre ces deux statuts, mieux vaut s’informer et prendre ses dispositions à l’avance.
Afin d’illustrer les différences de traitement entre les deux statuts, prenons l’exemple de Lucie (51 ans) et Paul (58 ans). Tous deux divorcés, partagent leur vie depuis 3 ans. Ils ont chacun deux enfants d’un premier mariage. Paul se pose la question des prestations que toucherait Lucie s’il venait à disparaître avant elle et sachant qu’il souhaiterait lui léguer 60% de sa fortune. En ce qui concerne le 1er pilier, l’AVS ne verse aucune rente au concubin survivant. En revanche, si Lucie et Paul étaient mariés, Lucie aurait droit à une rente de veuve versée par l’AVS.

Pour ce qui a trait au 2e pilier (LPP), la loi donne la possibilité à l’assuré de désigner son concubin comme bénéficiaire sous certaines conditions : être à la charge du défunt, ou avoir formé avec ce dernier une communauté de vie ininterrompue d’au moins 5 ans immédiatement avant le décès, ou devoir subvenir à l’entretien d’enfants communs. De plus, la caisse doit impérativement être informée par écrit du concubinage. Il est d’ailleurs judicieux de se renseigner auprès d’elle pour savoir si des dispositions particulières ont été mises en place pour les concubins. Dans le cas qui nous intéresse, étant donné que Paul et Lucie ne partagent leur vie que depuis 3 ans, cette dernière n’aurait pas droit à une rente ou à un capital de la caisse de pension.

Dans le cas du 3e pilier lié (A), la loi permet de désigner comme bénéficiaire unique « la personne qui avait formé avec le titulaire une communauté de vie ininterrompue d’au moins 5 ans immédiatement avant le décès ». Une fois encore, Lucie ne recevrait aucune prestation à moins que Paul n’ait annoncé sa volonté au moyen d’une déclaration écrite à son établissement bancaire ou à la compagnie d’assurances qui gère le 3e pilier lié (A). Par rapport au 3e pilier libre (B), l’ordre des bénéficiaires d’une assurance-vie peut être défini individuellement, selon la loi, sur le contrat d’assurance et Lucie pourrait alors avoir droit à une prestation. On l’aura compris, il est crucial de prendre des dispositions sous la forme d’un testament ou d’un pacte successoral. La somme des biens à libre disposition qui ne font pas partie des réserves héréditaires (celles destinées aux enfants de Paul) s’appelle la quotité disponible. Pour les concubins (assimilés aux célibataires sur le plan du droit civil), cette part est inexistante en l’absence de testament. Si un testament existe, la quotité disponible peut être léguée. Dans le cas présent, les enfants de Paul ont droit à 50% de l’héritage et Lucie peut bénéficier des 50% restants au maximum. Pour recevoir 60% de l’héritage, il faudra alors obtenir au préalable l’accord des enfants de Paul.

Enfin, au niveau fiscal, les concubins sont particulièrement désavantagés par rapport à un couple marié (tableau). A Genève par exemple, le taux d’imposition des droits de succession entre concubins se situe aux alentours de 54.6% alors qu’un conjoint survivant n’en paie aucun. Les concubins ne sont pas héritiers légaux. Il est néanmoins possible de transmettre à ceux-ci tout ou partie de son patrimoine, mais cela demande une planification en amont, n’attendez donc pas la dernière minute !

*Directeur Wealth solutions, BCGE

Impôt sur la succession, pour un concubin héritant de CHF 112'000

Canton Impôts en CHF Exonération / Déduction en CHF
GE
56'448
500
VD
56'000
10'000
VS
28'000
10'000
NE
50'400
10'000
JU
39'200
10'000
FR
40'018
5'000
BE
16'000
12'000
ZH
19'690
5'000
SZ
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